Peter Schreyer, l’homme qui a tout changé chez Kia
Le légendaire designer Raymond Loewy écrivait dès 1953 : « la laideur se vend mal ». Sous entendu, le style est un argument commercial de premier plan. Mais un argument parfois secondaire aux yeux de constructeurs automobiles préférant jouer la sécurité et lancer un modèle qui, à défaut de vraiment plaire, évite au moins de déplaire.
Un « non-design » dans lequel les constructeurs asiatiques ont souvent été maîtres, afin d’avoir des gammes susceptibles de convaincre le client de Dallas comme celui de Lyon ou de Nagoya. C’est bien connu : les autos japonaises sont « nippones, ni mauvaises », les coréennes sont blêmes, etc. Ce plus petit dénominateur commun du design banal a donné une palanquée d’autos toutes aussi peu mémorables les unes que les autres. Heureusement, la fadeur n’est pas une fatalité : Kia l’a prouvé.
En matière de design, ce constructeur coréen revient pourtant de loin. Rappelons que lorsque Kia débarque en France dans les années 90, c’est avec la Sephia :
Là, quand je vous parle de « non-design », on est en plein dedans ! Heureusement, aujourd’hui, Kia, c’est plutôt ça :
Que s’est-il passé entre ces deux photos ? C’est tout simple : au milieu des années 2000, quelqu’un à la direction du groupe de Séoul a du tomber sur les écrits de Raymond Loewy, et a décidé d’appliquer les principes du « maître » : installer le design au cœur des préoccupations de la marque et l’utiliser comme moteur de croissance. En 2006, Kia embauche ainsi un certain Peter Schreyer comme patron du centre de style de la firme.
Lorsqu’il est approché par Kia, l’allemand Peter Schreyer peut se targuer d’avoir signé des modèles comme l’Audi TT ou la Volkswagen New Beetle. Diplômé du Royal College of Art de Londres, c’est un designer talentueux qui travaille pour l’un des plus grands groupes automobiles mondiaux. Schreyer aurait très bien pu continuer sur cette voie toute tracée, mais il a décidé de relever ce défi : donner une identité visuelle à une marque qui n’en avait aucune.
Pour un constructeur automobile, l’identité visuelle commence par la face avant d’un modèle. Toutes les marques à forte image ont développé leur propre « visage » : deux haricots et quatre phares chez BMW, la grande calandre verticale « Singleframe » chez Audi, la grille chromée en triangle chez Alfa Romeo, ou le célèbre « Parthénon » de Rolls-Royce. Kia ne doit pas faire exception, et Peter Schreyer invente pour la marque coréenne le « Tiger Nose », une calandre plutôt agressive qu’il introduit sur le concept-car Kee présenté au salon de Francfort en septembre 2007.
Ce concept-car sera le premier de toute une série (voir la galerie ci-dessous), chez un constructeur auparavant peu prolixe en la matière. Sous l’impulsion de Peter Schreyer, Kia n’hésite plus à explorer de nouvelles voies, y compris celle de la micro-citadine façon Smart avec l’étonnant concept-car Pop dévoilé au dernier salon de Paris. Une voiture à mi-chemin entre l’animal extra-terrestre et… la gélule de médicament ! De l’audace chez un constructeur coréen ? Eh oui, c’est possible !
En l’occurrence, l’audace paye. Kia affiche une croissance à faire pâlir d’envie bien des constructeurs : + 26,5% en 2010 par rapport à une année 2009 déjà excellente. La firme ne connaît pas la crise et progresse sur tous les marchés, ceux des pays émergents bien sûr (+ 38,3 % en Chine, + 47,1 % partout ailleurs), mais aussi sur les marchés occidentaux, réputés difficiles et saturés (+ 18,5 % en Amérique du Nord, + 18,1% en Europe), où Kia met en avant une garantie de 7 ans jamais vue auparavant.
En l’espace de seulement cinq ans, Peter Schreyer a contribué à faire exister la marque Kia auprès du grand public. Et gageons qu’il n’a pas fini de nous surprendre ! On se donne rendez-vous au salon de Francfort pour la prochaine surprise du chef ?
Et vous, seriez-vous prêt à acheter une Kia ? Y’a-t-il un modèle dans la gamme qui vous séduit particulièrement ?
5 commentaires