Perle rare : BMW M1
Je relance la série des Perles rares avec celle qui reste peut être la plus mythique BMW à ce jour : la M1. Première bavaroise à recevoir l’appellation Motorsport, elle reste à ce jour la seule BMW à moteur central jamais produite. Mais malgré sa ligne intemporelle et son fabuleux moteur, la M1 garde un amer goût d’inachevé : conçue pour la compétition, elle n’y laissera qu’un souvenir aussi vague que terne. Destinée à rivaliser avec Porsche et Ferrari, la M1 ne fera finalement que de la figuration. Pourtant, les meilleures fées se sont penchées sur son berceau, mais rien n’y fit… Retour sur une épopée fabuleuse et inaboutie.
Tout commence en août 1972 : cet été-là, BMW présente le concept-car Turbo. Dessiné par le styliste français Paul Bracq, c’est un coupé d’allure futuriste, doté d’un moteur central (le bloc de la sportive 2002 Turbo) et de portes papillon. La BMW Turbo est une sportive légère (980 kilos) et performante, capable d’accélérer de 0 à 100 km/h en 7 secondes et d’atteindre les 250 km/h en vitesse de pointe. Le projet est aussi prometteur qu’abouti, mais le choc pétrolier le met au rancard. La BMW Turbo rentre au musée et n’en sortira plus… du moins sous cette forme.
Quelques mois auparavant, Jochen Neerpasch a pris la direction d’une toute nouvelle entité de la marque à l’hélice : BMW Motorsport GmbH. Ancien pilote d’usine Porsche et ex-patron du service compétition de Ford Cologne, Neerpasch est un homme d’expérience qui nourrit de grandes ambitions pour BMW en course. Il rêve de Formule 1, mais le sport automobile en général n’a pas bonne presse au lendemain du choc pétrolier : les priorités sont ailleurs, notamment dans le développement de variantes économiques des modèles de série. Neerpasch se rabat donc sur la Formule 2 et sur le Championnat d’Europe des voitures de tourisme, où les 3.0 CSL d’usine menées par Hans Stuck et Jacky Ickx affrontent les redoutables Ford Capri. Mais il garde un atout dans sa manche : un projet aussi coûteux qu’ambitieux de berlinette à moteur central et carrosserie en fibre de verre. L’objectif : vaincre les Porsche dans les épreuves d’endurance.
Mais le développement de celle qui allait devenir la BMW M1 prend du retard. Neerpasch voulait un moteur suralimenté, il devra se contenter d’un 6 cylindres atmosphérique de 277 ch. La voiture est finalement présentée au salon de Paris en 1978, avec comme objectif la production des 400 exemplaires requis pour l’homologation en Groupe 5. Mais entre temps, la réglementation sportive a été modifiée, et les retards accumulés par le projet rendent la M1 obsolète dès sa sortie. Grâce à ses contacts auprès de la FOCA (Fédération des constructeurs de Formule 1) et au soutien financier de Goodyear, Jochen Neerpasch parvient cependant à sauver la M1 de la noyade en organisant le championnat « Procar » en lever de rideau des Grand Prix. Cette éphémère compétition (elle se tiendra en 1979 et 1980) verra s’affronter les plus grands pilotes : Niki Lauda, Nelson Piquet, Jacques Laffite, Didier Pironi, Patrick Depailler ou encore Hans-Joachim Stuck, aux prises dans la vidéo suivante avec Manfred Winkelhock à Donington : sacrée bagarre !
C’est une vitrine belle mais coûteuse pour BMW, qui doit bientôt fournir des moteurs à l’écurie Brabham. Les dirigeants sifflent la fin de la récré à l’issue de la saison 1980, préférant concentrer l’attention des ingénieurs de Motorsport sur leur nouveau métier de motoriste. La M1 tentera parallèlement une carrière en endurance, avec pour meilleur résultat une deuxième place en catégorie IMSA aux 24 Heures du Mans 1979 pour la M1 pilotée par Manfred Winkelhock, Marcel Mignot et le commissaire priseur Hervé Poulain. Ce dernier avait pour l’occasion demandé à son ami Andy Warhol de décorer la voiture, dans la lignée des « Art Cars », initiée en 1975 par Alexandre Calder.
La version de série de la M1 continuera d’être produite chez Lamborghini jusqu’en 1981. Dessinée par Giugiaro, elle s’inspire clairement du concept-car Turbo de Paul Bracq, mais en est une variante plus sobre et intemporelle. Bâtie autour d’un châssis tubulaire en acier et habillée d’une carrosserie en fibre de verre, la BMW M1 ne pèse que 1 300 kilos, soit 220 de moins qu’une 635 CSi de la même époque. Son moteur M88 est une vraie pièce d’orfèvre, avec de sublimes échappements « spaghetti », 24 soupapes, 6 papillons de gaz individuels, une injection mécanique et une gestion électronique Marelli. Ce bloc développe 277 ch, ce qui propulse la M1 de 0 à 100 km/h en 6,5 secondes et lui permet d’atteindre les 260 km/h. Hélas, la voiture est hors de prix (113 000 marks)… et tellement coûteuse à produire que BMW y laisse des plumes, même à ce tarif. La firme tirera le rideau sur l’opération après avoir produit 455 voitures, auxquelles il convient d’ajouter les châssis produits pour le championnat Procar.
Aujourd’hui très recherchées, les rares BMW M1 ne s’échangent pas à moins de 150 000 euros. Précisons pour être complets que BMW a présenté en 2008 un concept-car rendant hommage à la M1 d’origine. Finissons sur cette vidéo, qui montre un bel exemplaire se dégourdir les roues sur le circuit du Nuerburgring, en Allemagne.
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